Polyharmonies
![]() |
11 février 2025, Polyharmonies. Le Commun. Genève.
L’envie de se rassurer face à la complexité de la nature et de la saisir à travers l’artifice du nombre et de la géométrie demeure déterminante à l’âge du machine learning. Elle remonte au moins aux traces écrites que nous conservons des Babyloniens, et devient systématique chez les pythagoriciens, qui espèrent trouver les clefs numériques d’une «harmonie de la réalité». L’astronome Johannes Kepler cherche encore ces clefs au 17e siècle, dans son livre Harmonices Mundi, où chaque solide platonicien correspond à un élément : terre‑cube, eau‑icosaèdre, air‑octaèdre, feu‑tétraèdre, éther-dodécaèdre. Les rapports des volumes de ces corps correspondent en outre, pour lui, aux rapports entre les rayons d’orbite des planètes, ainsi qu’aux rapports des fréquences entre les différentes notes d’une gamme pythagoricienne. Dans cette installation audiovisuelle à 180°, la spectatrice se déplace à l’aide d’une manette de jeu pour entendre ces variations de fréquences entre les 5 polyèdres keplériens, émises par 4 haut-parleurs situés aux coins de la pièce. La manette permet aussi de centrer les polyèdres ou de les distribuer dans l’espace, pour écouter et sentir vibrer un accord cosmique tel que pouvait imaginer l’entendre Johannes Kepler. Il s’agit surtout d’interroger les limites rationnelles d’un modèle géométrique de la nature, pour en redécouvrir la richesse poétique. À l’intérieur du cube au centre de l’installation Polyharmonies, la spectatrice trouvera la vidéo «Es ruft zu dir», qui expérimente avec les fréquences d’ondes et réfléchit aux notions de centre et de périphérie, de la position géocentrique ou allocentrique de l’humain. |