Visualisation de flux géographiques
André Ourednik, 2013, « Visualisation de flux géographiques », in Rapport pour la DATAR sous mandat du Laboratoire Chôros EPFL. Les cartes de flux communiquent le mouvement d’objets tangibles (personnes, notes bancaires, produits etc.) et d’objets non‐tangibles (énergie, idées, phonèmes etc.) à travers l’espace. Les pre‐ mières cartes de flux apparaissent à partir du 19e siècle dans les travaux de Henry Drury Harness, Alphonse Belpaire (Figure 30) ou de Charles Joseph Minard. Tout traitement informatique de cartes de flux est tributaire d’outils mathématiques et algo‐ rithmiques implémentés dans les logiciels. De ce point de vue, il existe deux manières de concevoir un flux : comme un phénomène continu ou comme un phénomène discret. Les flux continus correspondent à des processus de diffusion dans l’espace euclidien et peuvent être présentés sous forme de champs de vecteurs, de zones de potentiel ou d’isolignes (2.3). La cartographie de flux discrets, sur lesquels nous nous penchons prioritairement dans le pré‐ sent document, relève de la visualisation de graphes. Un graphe est un ensemble de nœuds (vertices), dont certains sont directement reliées par une ou plusieurs arrêtes (edges). Si le graphe contient une arrête asymétrique (dénotant par exemple une relation du nœud u vers le nœud v, sans relation réciproque de v vers u) le graphe est dit orienté (directionnal). Si toutes les relations sont symétriques, le graphe est non orienté (non‐directionnal). Chaque arrête peut être porteuse d’attributs qualitatifs (type de relation) et quantitatifs (le poids de chaque relation, c’est‐à‐dire son importance). Les nœuds peuvent de même être dotés d’une plurali‐ té d’attributs. Ce cadre abstrait s’ouvre au traitement d’une multiplicité de types de réseaux, dont ceux des flux de mobilité individuelle, d’information ou de produits matériels. Généralement, les flux sont modélisés par des graphes orientés, à moins que l’on ne traite de flux symétriques. Prenons comme exemple le Tableau 1, qui présente un flux de pendulaires à travers un réseau de transport public fictif composé des stations A, B, C et D. Traduite en graphe, cette matrice de flux équivaut à quatre nœuds et six arrêtes. Le poids de chaque arrête correspond au nombre de pendulaires voyageant des stations de départ dans les colonnes aux stations de destination dans les lignes. La Figure 1 et la Figure 2 donnent une image du graphe en question. On constate qu’il s’agit d’un graphe à une seule composante, tous les nœuds faisant partie d’un réseau inter‐relié. Il est courant, dans les analyses de flux, de trouver des graphes à plusieurs composantes déconnectées – cas de figure se pré‐ sentant par exemple lors d’une analyse de réseaux de transports intra‐urbains faite conjointement sur plusieurs villes. L’usage d’un algorithme élaboré s’impose lorsqu’il s’agit de visualiser un graphe possédant un grand nombre de nœuds et d’arrêtes. Des algorithmes identiques sont souvent implémentés dans une pluralité de logiciels. Le présent document fait état des algorithmes existants sans se pencher spécifiquement sur leur fonctionnement, mais en clarifiant les transformations cartographiques qu’ils permettent d’accomplir. Ces dernières sont discutées dans le §2. Dans le §3, nous présentons les logiciels majeurs, que nous évaluons en fonction des critères dressés, c’est‐à‐dire en fonction des algorithmes qu’ils proposent. La capacité d’interaction avec d’autres logiciels, en termes de données, d’éléments graphiques et de séquences programmatiques est aussi évaluée. Le §4 est consacré à des solutions de cartographie de flux non comprises dans la catégorie de logiciels stricto sensu. Il s’agit, d’une part, de plugins et d’éléments de logiciels SIG et cartomatiques courants (ESRI, Manifold, qGIS etc.), d’autre part de bibliothèques cartographiques pour des langages de programmation majeurs. Dans une dernière partie (§5), nous évoquons les services cartographiques permettant d’externaliser la production de cartes de flux. |